Le goût du partage comme lumière jetée sur le poème pourrait être l'une des clés du Lac d'Eugénie, second album de Sylvain GirO après un inaugural et abondant Batteur de grève (ou plutôt presque troisième - on ne saurait faire l'impasse sur le bel EP transitionnel Les camélias de Nantes).
La poésie peut être le pivot de la pensée moderne, l'endroit où le merveilleux confronte le réel et c'est ce que Sylvain GirO met en jeu ici de tout son esprit, de ses mots, traductions interrogatives du rythme et de la respiration des êtres, de tout son corps par un chant plein, engagé, soufflant. Par un compagnonnage profondément vécu aussi. Trois musiciens totalement immergés, Julien Padovani (claviers, accordéon), Erwan Martinerie (violoncelle) et Jean-Marie Nivaigne (batterie) forment avec Sylvain GirO un groupe prompt, vigoureux, allié des mots. Sur la même note, le chanteur convie d'autres invités d'une géographie bien sentie, son vieux camarade le flûtiste Erwan Hamon (aussi membre de Katé Mé et du Collectif Jeu à la Nantaise et bien sûr du Hamon Martin Quintet auquel Sylvain participe comme parolier), le guitariste Laurent Rousseau (La Féroce mécanique des jours) et Tony Hymas pour une composition (Sylvain GirO a écrit pour lui les paroles de deux chansons de Chroniques de résistance) sans oublier la photographe Val K familière des mêmes eaux, des mêmes terres de Notre-Dame-des-Landes.
Le Lac d'Eugénie relate en teintes sensibles, en une incarnation de musique assurée d'expériences et de mots copieusement entrelacés. Dix chansons comme autant de microcosmes à l'écoute du monde, à la surface de sa mémoire, qui livrent leur secret.