Conférence - concert le 5 novembre :
Jean Rochard - Catherine Delaunay

À l'invitation des Communaux*

À l’heure où l’industrie musicale est devenue l’industrie des données
, où la partie nommée ou proclamée indépendante de la production musicale est souvent prise dans le tourbillon hautement technologique sans avoir eu le temps d’y penser, la musique est-elle encore un langage et de quoi peut-elle encore nous entretenir ?

Producteur d’albums phonographiques depuis 1980, mais aussi organisateur de concerts depuis 1978 ou scripteur occasionnel depuis 1976, Jean Rochard évoquera, par son cheminement, les questions, esquisses de réponses ou expériences relatives à l’état de la musique aujourd’hui et ce qui l’a amené là. Catherine Delaunay, clarinettiste apportera un commentaire musical en réagissant à ce qui se dira ou bien à quelques pièces musicales écoutées. Il s’agira de récit, de jeu, d’écoute, de réciprocité ouverte.

Les clés de quelques albums offriront leur part d’expérience. Buenaventura Durruti, ou comment les récits de Violeta Ferrer, son vécu à Barcelone dans les années 30, les actions de ses parents instituteurs anarchistes, sa perception de la révolution de 1936, de la guerre d’Espagne, de l’exil en France, sa connaissance de la chanson disparue de Durruti, son amour de la poésie de Federico Garcia Lorca aussi, ont amené, en 1996, la réalisation de ce disque. Double album dont la forme esquissée s’est trouvée fortement influencée, sinon heureusement complètement chahutée, par les mouvements sociaux d’alors - en premier chef, celui des sans-papiers. La nécessité de trouver une sorte de lien politique-musique autrement que par le texte est ce qu’il indique d’expériences personnelles et communes (l’idée musicale stimulée par une idée politique ou bien l’inverse).

Les derniers mots du père de Violeta Ferrer, Acrato Lulle, dans la prison de Montjuich en 1933 furent à propos du génocide des Indiens d'Amérique. Ceci n’est sans doute pas étranger à la réalisation, à partir de 1990, d’une série d’albums du pianiste et compositeur Tony Hymas se liant avec des Indiens d’Amérique comme les poètes et activistes Barney Bush (disparu récemment) ou John Trudell. Oyaté, Remake of the American Dream, Left for Dead se sont fait l’écho d’un attachement fort qui s’est développé par nombre d’aventures. La musique en a été l’assise, mais a aussi permis un approfondissement des relations s’exprimant bien au-delà du studio d’enregistrement.

On reviendra sur la question épineuse de l’enregistrement musical, ses bouleversements, apports et contradictions ce qui revient à l’écoute et ce qui revient au jeu, le disque objet documentaire ou fictionnel. On abordera celle des possibles actions communes (regroupement de producteurs indépendants comme Les Allumés du Jazz) et de leurs impossibles aussi, de la réalisation d’un « village » comme idéal modeste. On n’évitera pas l’infernale épreuve des mutations récentes (streaming), de ce qu’elles impliquent dans la redistribution des cartes de géographie musicale, des moyens de production et de perception et autres métamorphoses puissamment sociales.

Bref, il s’agira simplement, par le point de vue d’artisans, d’entrevoir si, pour eux, produire de la musique a encore un sens.

*Les Communaux est une constellation de personnes et de collectifs qui œuvrent à la réappropriation de nos rapports à des milieux de vie. Les Communaux est un lieu de partage d’enquêtes, d’interventions, de luttes, au plus loin de toute logique de délégation et de représentation politiques. Il s’agit de mettre en œuvre un travail d’exploration d’expériences, de solidarité, de coopération, d’entraide et de réappropriation de savoir-faire.



Le 5 novembre à 19h

Théâtre L'Échangeur

59 avenue du Général de Gaulle
93170 BAGNOLET

Métro : Croix de Chavaux